La décision est forte, radicale, mais pouvait-il en être autrement face aux actes et dérives inqualifiables qui ont souillé la première rencontre de la finale des playoffs de futsal, entre Differdange et le Racing FC Union Luxembourg ?

Joueurs qui en viennent aux mains et se muent en boxeurs, supporters qui s’invectivent puis s’affrontent, dans la salle et en dehors de celle-ci, arbitre touché et blessé par un projectile, bouteilles et bâtons projetés… Dans ce tableau d’une infinie tristesse, les noms d’oiseaux qui ont fusé dans un air irrespirable sont presque assimilés à des broutilles…

Interrompu à la 17ème minute par le referee principal du match, Fabio Aguiar, le match n’a évidemment jamais repris. Une décision logique et légitime compte tenu de l’extrême nervosité qui enveloppait alors les deux équipes.

Par contre, la sanction énoncée par la Fédération luxembourgeoise de football (dont dépend la compétition de futsal) prête, elle, le flanc à la critique : « Fin du championnat 2018/2019, avec effet immédiat ». Rideau sur la compétition ! Du balai, on doit faire place nette. La force du symbole voulant marquer les esprits et provoquer une vraie prise de conscience, pour que les comportements changent. « Les graves incidents qui ont émaillé cette première manche des playoffs démontrent hélas un climat étranger à tout fair-play et respect » explique le président de la FLF, Paul Philipp, au nom d’un Conseil d’administration qui a tranché dans le vif.

« Stop, la seule option »

« Tout au long de la saison, nous avons pu constater que ce genre d’incidents regrettables avait tendance à se répéter. Ce stop immédiat est la seule option que nous pouvions choisir pour garantir l’intégrité physique des joueurs, des arbitres et des spectateurs » appuie le président. « Une décision de cette nature fait toujours des mécontents et peut toucher des « innocents », nous sommes les premiers à le regretter. » Mais la FLF ne veut évidemment pas être prise en défaut d’imprévoyance, craignant un recours à la justice civile en cas de nouveaux incidents graves, si la compétition avait été maintenue. « La décision n’a pas été prise à la légère mais a été mûrement réfléchie » insistent Paul Philipp et Joël Wolff, respectivement président et secrétaire de la fédé. « Les dommages financiers pour les clubs concernés ? Quel est le sponsor qui souhaiterait voir son image associée à tels débordements ? » Poser la question, c’est y répondre.

Il n’empêche, l’émoi provoqué par cette décision fédérale est à la mesure de la violence des affrontements déplorés le week-end dernier.

Du côté de Differdange, on est abasourdi. Tout au plus, Felipe Costa et ses joueurs redoutaient-ils un score de forfait, même si les échauffourées ont eu lieu en leur propre salle et principalement à cause de leurs supporters, ce qui ne semble pas contesté.

« On punit les victimes ! »

Mais c’est dans l’autre camp, celui de l’Union Luxembourg, que l’indignation et l’incompréhension se mélangent pour former un cocktail que Karine Reuter, présidente du club, trouve imbuvable. « Une décision injuste, injustifiable et fausse, qui porte gravement atteinte à l’image du football luxembourgeois, à celle du futsal en particulier » estime Mme Reuter dans une lettre ouverte adressée aux dirigeants de la discipline mais aussi à la presse.

Au Racing Union Luxembourg, on estime la décision « démesurée et illégale. En aucun cas vous ne pouvez punir la victime ! » tonne Karine Reuter, qui a d’ores et déjà annoncé qu’elle saisirait la justice pour faire annuler… l’annulation. « Lorsque des joueurs licenciés commettent des actes antisportifs, sont coupables des violences physiques voire des coups et blessures volontaires, ils doivent être punis, au niveau du sport et de la justice pénale. Mais pourquoi sanctionner aussi les victimes ? »

Ulcérés, les dirigeants annoncent qu’ils introduiront « tous les recours, que ce soit au niveau fédéral, national, international, UEFA et FIFA. Des demandes en indemnisation à l’encontre de la Fédération seront faites dans les jours à venir. »

Deux poids, deux mesures ?

Parfois désunie et conflictuelle, la famille du futsal s’accorde toutefois sur un point : le sentiment d’être victime de mesures discriminatoires, bien plus sévères que celles parfois prises en football. Dernier exemple en date, le derby sans aucun enjeu sportif entre Wilwerwiltz et Troisvierges, qui s’est terminé, il y a quelques jours à peine, en eau de boudin. Un joueur du club visiteur, originaire du Cameroun, est sorti de ses gonds après avoir visiblement été victime d’insultes à caractère raciste, des personnes proches des deux clubs s’en sont finalement mêlées, ça s’est refermé dans la confusion et le pugilat, sans que le FLF prononce l’arrêt du championnat de division 3 pour autant.

« Deux poids, deux mesures » estime Karine Reuter. « Une raison de plus pour que la justice soit respectée en futsal ! »

Le match entre la Fédération et les clubs de futsal se poursuivra malheureusement devant les tribunaux.

En attendant, plusieurs sanctions sont déjà tombées ce jeudi à l’encontre de Differdange :
– Cristiano Guedes est suspendu six journées pour voie de fait
– Daniel Oliveira est suspendu 14 journées pour voie de fait avec blessure
– Manuel Da Rocha est suspendu dix journées pour voie de fait
– Le club est condamné à de lourdes amendes pour un total de plus de 2.000 euros
– La section futsal est suspendue jusqu’au 31 août 2019 et le Racing remporte le match sur tapis vert

Cette dernière sanction pourrait paraitre anecdotique vu l’arrêt du championnat mais le Conseil d’Administration de la FLF doit se revoir lundi. Il pourrait y être décidé de déclarer le Racing champion et lui permettre ainsi de disputer la Coupe d’Europe l’été prochain.

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